Pourquoi plus personne ne veut travailler dans le social ?
réponse subjective à une question mal posée
ou
Devenir Educateur spécialisé
Un changement de paradigme dans l’orientation et la formation des étudiants
Table des matières
Introduction………………………………………………………………………………………………………………… 1
Candidater comme on achète une chemise………………………………………………………………………… 1
Le sentiment de ne pas être à sa place……………………………………………………………………………… 2
La formation comme une prépa au diplôme………………………………………………………………………. 3
Des étudiants toujours plus éloignés du savoir théorique et de l’écriture………………………………… 3
Un calendrier pédagogique déformé par la pénurie de stages……………………………………………….. 4
L’éducateur apolitique, l’expert du projet………………………………………………………………………….. 4
« Est-ce que cette formation est assez bonne pour moi ? »…………………………………………………… 6
Introduction
D’années en années, le profil des étudiants candidats à l’entrée en formation d’éducateur spécialisé a évolué. Ce ne sont plus des professionnels en reconversion qui souhaitent évoluer dans leur carrière qui se présentent mais de jeunes adultes (pour certains très jeunes) sortant d’une ou deux années de fac, d’un service civique, de quelques années dans l’animation voire d’un bac techno sanitaire et social. Le phénomène ne date pas d’hier mais la candidature via parcoursup, l’orientation postbac et la fin des concours écrits l’ont largement accéléré. Cette nouvelle génération de futurs éducateurs n’a pas les mêmes aspirations, les mêmes contraintes, la même approche de la formation et du travail social. Je suis étudiant de 3e année en formation d’éducateur spécialisé au centre de formation « Askoria », situé à Rennes et c’est de cette nouvelle génération de travailleurs sociaux dont je fais partis, de son approche de la formation et du métier que je souhaiterais parler.
Cet article fait suite à un certain nombre de mails échangés au sujet de mon expérience de formation avec Laurent Ott, directeur de la MJC/Centre sociale Intermèdes Robinson. Suite à nos échanges, Laurent m’a invité à compiler ma pensée et à transformer mes observations en un texte cohérent et argumenté, le voici.
Candidater comme on achète une chemise
Le choix que constitue la candidature via parcoursup est, d’après une expression de Laurent, un « choix faible ». [1]
C’est une option parmi d’autres, parfois ce n’est même pas notre premier choix. Le fonctionnement de Parcoursup nous invite à penser notre avenir sur le mode du coût / bénéfice, tel « l’acteur rationnel » cher à Herbert Simon. Quelles sont les contraintes ? Quels sont les avantages ? C’est le même paradigme que lorsqu’on achète une chemise ou qu’on choisit dans quelle région on veut passer nos vacances. La réflexion peut très bien être la suivante « Educateur pourquoi pas ? Une mauvaise paie mais un travail qui a du sens, être socialement valorisé, un environnement de travail bienveillant, des possibilités d’évolution de carrière…. Aller je tente, il sera toujours temps pour changer d’avis. »
Au moment de faire ma candidature, j’ai été étonné du peu qu’on m’a demandé. Sortant en milieu de parcours de fac d’histoire, sur le papier rien ne me destinait à entrer en formation d’éduc. Je m’attendait à être recalé. Je me donnais à tout casser 40% de chances de rentrer. Et encore, parce que j’étais un homme dans un métier majoritairement féminin. En entamant le processus parcoursup, on se voit obligé de rentrer ses notes de première et de terminale dans l’algorithme. Plusieurs années après avoir passé mon bac, je voyais mal quelles indications mes notes de SVT allaient bien pouvoir fournir aux personnes étudieraient ma dispositions à apprendre le métier d’éducateur. L’étude des éruptions volcaniques m’aiderait peut-être à comprendre le mécanisme de la violence ? Poursuivant sur le chemin sinueux de parcoursup, j’étais ensuite obligé de scinder en quatre paragraphes distincts de 2500 caractères toutes les raisons qui m’amenaient à penser que je ne me trompait pas d’adresse. J’étais bien en peine de les résumer et plus encore de les exprimer dans les cases qui m’étaient imposées.
Par la suite, les oraux que j’étais sensé passé ont été annulés, COVID excuse.
Malgré tout, j’ai été pris. J’en ai été le premier étonné.
J’ai ainsi commencé ma formation en septembre 2020 au sein d’une promo de 80 étudiants. Je m’étais imaginé comme le plus jeune du groupe avec un parcours atypique et toutes mes preuves à faire. Il s’est avéré que du haut de mes 21 ans j’étais tout proche de la moyenne d’âge du groupe et que mon parcours n’avait rien d’atypique. J’étais même l’archétype de l’étudiant en formation d’éduc. Un bac général, quelques années de fac ponctuées d’engagements bénévoles et une poignée d’expériences dans l’animation. J’avais déjà vu des enfants, je leur avait même déjà parlé. Cela suffisait sûrement.
Le sentiment de ne pas être à sa place
Comment se sentir à sa place dans ce contexte ? Evidemment, on se demande ce que les examinateurs ont bien pu voir en lisant notre candidature, ce qu’ils ont bien pu fantasmer sur nous. La faiblesse du choix qui nous a conduit là, l’illisibilité du processus de recrutement et l’absence de rencontre concrète avec un examinateur nous font douter. Pourquoi moi ? Ils ont vraiment cru ce que j’ai marqué dans cette lettre de motivation ? Comment ai-je réussi à leur faire croire que j’en étais capable ? Le syndrome de l’imposteur hante chacun de nous en ce début de formation.
Par la suite, les étudiants vivent une phase de forte remise en question sur un mode plutôt dégressif. Celle-ci a lieu aux alentours du milieu de la formation. On se rend compte qu’on a déjà parcouru une bonne moitié du chemin et que pourtant on ne se sent toujours pas prêt. Lorsqu’on a débuté le parcours, on avait déjà le sentiment d’en être incapable mais quelque part c’est aussi pour cela qu’on était là. Les trois ans à venir allaient résoudre ce manque de confiance en soi, allait créer ce nouveau nous, capable, déterminé et confiant. Un être qui aurait miraculeusement résolu tous ses conflits internes et qui serait même capable de se rendre chaque matin dans sa structure en s’y sentant à sa place. Cette phase dépressive a quelque chose du deuil de la formation comme moyen d’accéder à ce soi imaginaire.
A l’issu de ces étapes dans le processus de construction d’un sentiment de légitimité, il reste plus ou moins de monde. Aujourd’hui dans ma promo nous sommes un peu moins de 50 à être restés. L’école se targue d’un résultat presque parfait au diplôme mais oublie de préciser que 40% des étudiants ont abandonnés entre-temps. L’intensité du sentiment d’illégitimité et le nombre important de ces abandons sont pour moi deux des conséquences du choix faible que représente la candidature via parcoursup.
La formation comme une prépa au diplôme
La fin des concours écrits a aussi eu pour conséquence d’amener des étudiants toujours plus distants de l’écriture. L’écrit est vu par beaucoup comme un adversaire, une épreuve à passer douloureusement. Certains en sont très éloignés et les devoirs sur table ou les rendus de dossiers sont vécus comme de vraies angoisses qui peut prendre le pas sur tout le reste. Les étudiants ne sont pas disponible pour se poser des questions, ils sont trop flippés de l’examen à venir.
Cette terreur de l’évaluation et ce chipotage permanent sur la police du document à rendre, sur le délais, sur les attentes des examinateurs m’a véritablement surpris. La conception d’un diplôme basé sur un référentiel de compétences cloisonné est devenu la seule référence viable. Les étudiants voient l’obtention de leur diplôme comme une fin en soi et développent des stratégies personnelles cohérente avec ce seul objectif. La formation s’apparente dès lors plus à une prépa au diplôme avec un mode d’emploi sans cesse plus précis sur ce qu’il faudrait faire pour avoir son DEES. Exercer son bon sens, son esprit critique et se forger une vision solide du monde qui nous entoure n’est pas la priorité.
Bachoter, faire des fiches, coller aux attentes. Les apports théoriques sont pris comme des mots clés à ressortir, des auteurs à placer pour le diplôme. S’il faut lire, il le feront à condition qu’ils puissent s’en resservir dans un écrit ou un devoir. Les étudiants qui se considèrent comme sérieux et travailleurs se sentent menacés par ceux qui n’ont pas la même conception de la formation. Pas question de partager ses fiches, les autres n’ont qu’à travailler. A quoi sert ce cours s’il n’est pas noté ? A quoi bon se poser cette question, ce n’est même pas dans le référentiel métier ? Il règne un rapport profondément utilitariste au temps, aux savoirs, aux rencontres.
Les formateurs finissent par penser que cela fait partie de leur rôle de se plier aux attentes et de donner du crédit aux angoisses des étudiants. Ce faisant ils endossent la casquette de prof que les étudiants devenus élèves leur tendent.
Des étudiants toujours plus éloignés du savoir théorique et de l’écriture
L’une des principales fonctions de la formation est de faire intégrer aux étudiants un « langage professionnel », le fameux jargon de l’éduc. Un langage considéré dans le travail social comme professionnel, objectif, technique et soutenu par des références théoriques solides. Un curieux mélange d’acronymes (« MDPH », « MECS »), de mots fourretout (« accompagnement », « relation »), de mots techniques (« référence », « synthèse ») et de concepts issus d’autres disciplines (« transfert », « stigmate », « partenariat », « projet »). Dans sa thèse, Laurent Cambon[2] parle d’une crise de légitimité chez les éducateurs qui ne parviennent pas à définir précisément la nature de leur travail et qui empruntent leurs concepts, leur savoir « froid » dirait Laurent à d’autres disciplines comme la sociologie, la psychologie, le droit ou encore le management.
La formation entretient cette connaissance lacunaire des savoirs universitaires. On est par exemple encouragés à faire des « fiches concepts », des sortes de mémo des concepts clés à ressortir lors des épreuves d’analyse de situation. Cela sans avoir nécessairement lu leurs auteurs. Cela amène les étudiants à utiliser des termes tel que « le transfert » ou « la résilience » à tort et à travers sans s’y être réellement intéressé en profondeur. Ça amène aussi à penser les idées et le travail de recherche comme autant de mots clés à placer dans nos écrits ou en réunion.
Cette préparation à l’épreuve qui prend le pas sur la formation au métier a de grosses conséquences dans l’homogénéisation de la pensée et du vocabulaire puisque ce faisant on nous indique très clairement les termes qui « passent » et ceux qu’il faut mieux éviter. Le vocabulaire professionnel prend la forme d’un vocable autorisé qui, en plus d’être un langage d’initié, est en réalité assez pauvre.
Un calendrier pédagogique déformé par la pénurie de stages
En cohérence avec l’ancien profil d’étudiants qui avaient déjà un certain bagage professionnel, la formation d’éducateur spécialisé a été pensée sur la base d’un aller-retour entre pratique et théorie. Les apports théoriques étant avant tout conçus à partir des expériences de terrain des étudiants, que ce soit avant ou pendant la formation.[3] Etant donné le peu d’expérience préalable dont disposent aujourd’hui les étudiants en arrivant, les stages deviennent la principale source d’expérience pratique. L’attribution de ces derniers est donc un enjeu majeur pour les étudiants.
Un glissement s’est opéré. Pour les étudiants comme pour les formateurs, le stage semble être devenu cet objet ambigüe à la fois indispensable et angoissant. Le lieu de stage est déterminant dans l’esprit de l’étudiant quant à la qualité de sa formation. Ce lieu dirait tout de sa future capacité à s’inscrire comme un professionnel adapté.
Dans mon école, le fonctionnement du calendrier de la formation pratique a été entièrement conditionné par les règles de la gratification et par la pénurie des stages. Ces contraintes ont donné lieu à un calendrier de stage absurde du point de vue de la pédagogie. La durée maximum légale pour un stage non gratifié étant de 8 semaines, seul le stage long « de référence » dépasse cette durée. Ainsi sur les 4 stages que nous sommes amenés à faire, trois durent moins de deux mois. Autant dire que si l’étudiant tombe mal pour son stage de référence, il a intérêt à s’accrocher. Cette modalité cause de très fortes inégalités au sein des promos, le stage de référence est un enjeu majeur de la formation. Tomber dans une bonne équipe, une institution intéressante avec un tuteur qui nous laissera expérimenter et qui saura nous accompagner, c’est le graal. Des étudiants qui considèrent être mal tombés ne se lassent pas de décrire leur calvaire et d’exprimer leur amertume. La remise en question apparaît d’autant plus difficile que le syndrome de l’imposteur n’est jamais loin. La nuance est difficile quand on se sent en permanence menacé dans son droit à être là, lorsque le doute est omniprésent. Le problème vient forcément du lieu de stage. Sinon cela voudrait dire que le problème c’est soi, et ça c’est insupportable.
L’éducateur apolitique, l’expert du projet
Le développement des centres de formation privés à but lucratif [4] a amené une dépolitisation de la formation et du métier. Les intérêts de la direction de l’école divergent largement des intérêts des étudiants. Même en se situant dans une perspective marchande, nous ne sommes même pas réellement les clients de l’école puisque c’est la région qui finance nos formation. Ainsi l’école a pour premier objectif de répondre à la commande de la région. L’image joue donc un rôle particulièrement important dans cette relation, il faut voir les pyramides de petits fours lorsque les représentants du conseil régional viennent assister à une conférence.
Cela influence largement la manière dont sont envisagés les interventions proposées. Je me rappelle être allé voir la responsable de formation lors de l’intervention d’un représentant « d’Orange Solidarité » . Je ne comprenais pas pourquoi l’école acceptait de participer à ce qui était très clairement du social-washing et du lobbying. J’ai été bien vite renvoyé dans mes cordes « la formation c’est pas le supermarché » m’a répondu la responsable. J’imagine qu’il était un peu poussé de demander à aller lire au centre documentaire à la place de l’intervention.
Les seules critiques politique admises en formation sont celles faussement subversives mais pourtant tellement consensuelles du manque de reconnaissance de l’opinion publique ou du manque de moyens alloués au travail social. Des revendications qui ne s’adressent à personne et qui ne proposent rien. Dès que l’on nomme, dès que l’on critique avec un tant soit peu de précision ce qui ne va pas et ce qu’on imagine qu’il faudrait faire, on se détourne de nous. Le mot « politique » est assimilé à un militantisme déconnecté de la réalité et inutile. On y défends la neutralité de l’éducateur déguisé dans des valeurs humanistes perméables au néolibéralisme et à la soumission aux politiques sociales qui ne sont même plus interrogées. Aujourd’hui il est parfaitement acceptable de se dire « éducateur apolitique ». Je n’aurais jamais imaginé pareil oxymore.
Et pourtant l’injonction à « l’innovation » et au projet est partout. Il s’agirait de faire quelque chose qui n’a encore jamais été fait tout en s’inscrivant systématiquement dans la méthodologie du projet et en répondant à des objectifs consensuels.
J’exècre la méthodologie de projet qui emprisonne ma pensée dans une suite chronologique figée « diagnostique, moyens, évaluation », suite qui ne se déplie par ailleurs jamais dans cet ordre.
Le projet comme l’art de ne jamais s’engager vraiment face aux problèmes, de ne pas reconnaître qu’ils sont durables et systémiques. Une méthodologie qui découpe la réalité en une série de petits diagnostiques qui n’amèneront que de petits projets pansements. Bien visibles mais inefficaces. C’est une méthodologie qui correspond aux besoins des appels à projets et de des entités politiques de savoir ce qui est fait de leur argent mais qui ne répond pas aux besoins du terrain ou à une logique politique ou pédagogique.
Qu’importe si l’action n’est que ponctuelle. D’autres pourront la reconduire.
Qu’importe si le résultat n’est pas à la hauteur. Nous avons une obligation de moyens, pas de résultats.
Qu’importe si la moitié de ce qu’on marque dans notre diagnostique a été tordu pour obtenir la subvention.
Qu’importe si les mots ne sont pas honnête, si on ne croit pas en ce qu’on marque dans le projet. Ce qui compte c’est que cela fasse bien , que ce soit nouveau. Il s’agit d’allumer des étoiles dans les yeux des financeurs.
Dans le pays de l’évaluation quantitative, il n’existe pas d’échec. Dans le monde de l’appel à projet, il n’y a pas de mauvais résultat.
« Est-ce que cette formation est assez bonne pour moi ? »
Laurent me témoigne son état d’esprit au moment de sa propre formation d’éducateur. La question omniprésente chez lui était « est-ce que je suis assez bon pour la formation ? ». Aujourd’hui, ce serait plutôt « « Est-ce que cette formation est assez bonne pour moi ?».
Je suis d’une génération et d’un milieu social qui aborde les études non pas comme une chance, un « luxe » mais comme un droit et un outil naturel pour le passage du statut d’enfant à celui d’adulte[5]. Ce droit n’est pas interrogé sous le prisme du « mérite » ou d’une « chance » mais sous le prisme d’un choix rationnel à faire, de stratégies à élaborer pour son « avenir ». Tout dans la scolarité et dans l’orientation est construit pour nous amener à penser ainsi. Ces choix stratégiques commencent dès la fin du collège, voire plus tôt pour ceux qui sont évacués du système dit « général ». On pourrait aussi bien l’appeler « normé » en cela qu’il appose le stigmate douloureux de « l’échec » à ceux qui en sont exclus. Arrivés dans les études supérieures, cette manière d’envisager les cours, les formations, les stages reste la norme. C’est toujours sous le prisme du coût/bénéfice que se pense chaque orientation, chaque décision. « Si je vais là, j’aurais tel avantage et tel débouché mais telle contrainte ». C’est un calcul permanent que tous nous poussent à faire : amis, familles, professeurs… Lorsque j’ai pris la décision d’arrêter mes études d’histoire en milieu de parcours, je me suis heurté à l’incompréhension de pas mal de gens et notamment de mes amis et de mes parents. Pourtant en candidatant pour les écoles d’éducs, c’était la première fois que j’étais aussi sûr de quelque chose.
La question « est que je suis assez bon pour la formation ? » m’intrigue car je pense me l’être déjà posée en début de formation. C’est une question qui m’habitais sur les premiers mois et dans cette période tout me paraissait passionnant à propos de ce que j’y faisais. Je pense ne pas être le seul dans cette situation, cette première phase je l’ai jusqu’ici interprété comme une sorte de « lune de miel ». J’avais investi la formation de beaucoup d’attentes et j’étais confiant dans ce qu’elle allait m’apporter. Cela rejoins ce que je disais précédemment sur le fantasme d’une formation qui allait me transformer miraculeusement et sans douleur en un professionnel capable et confiant. Lorsque je me suis aperçu que la formation n’allait pas m’apporter cela, j’ai ressenti une profonde déception et je me suis complètement retourné. Je suis devenu particulièrement critique et virulent envers l’école et la formation, parfois de manière injustifiée ou exagérée. Passé cette phase, je me suis écarté de la formation et de l’exigence dans laquelle je m’étais mis. Je l’ai à nouveau regardé sous le prisme du coût/bénéfice : quels sont les cours qui m’apporte quelque chose ? Où ai-je envie de m’investir, où est-ce que ça ne m’intéresse pas ? Comment valider mes semestres avec un minimum d’effort puisque les examens ne m’apportent rien ? Aujourd’hui, je trouve ma motivation dans l’écriture de mon mémoire et dans mes stages. Je cherche une stimulation extérieure dans mon implication à divers projets, dans mes lectures, depuis peu dans mon intérêt pour la pédagogie sociale. Mais je ne me pose plus la question « suis-je assez bon pour cette formation ».
Cette manière d’envisager la formation « pour soi » m’évoque la nouvelle génération de travailleurs qui ne trouve plus dans le travail un but en soi mais un moyen. De plus en plus de personnes souhaitent travailler à temps partiel, à distance et préfèrent des conditions de travail agréables à un salaire plus important. C’est également le cas chez les travailleurs sociaux et à la sortie du diplôme, peu envisagent d’aller travailler tout de suite et encore moins là où il y en a le plus besoin. Les structures sociales en difficulté ne soulèvent pas un élan, une volonté de les relever mais plutôt de l’appréhension voire du rejet. Je pense que les deux phénomènes sont liés et qu’on peut déjà en voir les conséquences sur le secteur social avec la crise des recrutements.
[1] Laurent Ott, https://www.pedagogie-sociale.org/2022/09/05/lentree-en-formation-et-son-deroulement/
[2] Laurent Cambon, L’éducateur spécialisé à travers ses discours : une question d’identité, 2006
[3] Laurent Ott : https://www.pedagogie-sociale.org/2022/09/05/mutations-de-la-relation-au-travail-dans-le-social-partie-2-la-formation/
[4] Cependant, il existe toujours des écoles associatives à but non-lucratif, à lire le témoignage d’Alex étudiant de 3e année à l’Afertes Mandela : https://www.lien-social.com/La-pedagogie-sociale-en-formation-d-educ-spe-passer-de-l-etre-a-l-exister
[5] Laurent Ott : https://www.pedagogie-sociale.org/2022/09/05/mutations-de-la-relation-au-travail-dans-le-social-partie-3-les-stages/